Un spectre hante les Français : le déclin. La baisse relative du potentiel brut de la France est indéniable à mesure qu’émergent d’énormes masses démographiques et que, de plus en plus lourd, pèsent des économies en plein essor. 1% de la population mondiale, 5% du PIB global. Cette situation engendre deux réactions psychologiques opposées. Un auto-dénigrement masochiste et, à l’inverse, une extrême fierté nationale qui vit comme une revanche chaque succès, fût-il éphémère, comme si l’angoisse du déclin s’en trouvait momentanément apaisée.
Pourtant les atouts restent colossaux : un espace considérable avec une zone économique maritime de 11 millions de Km2, des industries très performantes (aéronautique, nucléaire, tourisme) ; des résultats brillants dans l’exportation du luxe et des savoir-faire agroalimentaires. Un rayonnement architectural, littéraire et cinématographique. Au sein de l’Union Européenne, la France contribue puissamment à l’élaboration et à l’adoption de normes et de standards mondiaux conformes à ses intérêts et adaptés à ses capacités.
Les compétences sont donc là. L’esprit d’entreprise n’est pas éteint. L’aptitude à l’innovation reste considérable. Beaucoup dépend d’une cohérence administrative et gouvernementale susceptible de surmonter les blocages ici, d’accommoder, là, les divisions, d’en finir avec des pratiques et des organismes périmés. Affaire d’État ? Non, plutôt d’état d’esprit, sans doute insuffisamment insufflé dans la formation des futurs responsables. Si elle entend maintenir son rang et accroître sa prospérité, la France n’a d’autre choix que la qualité des entreprises, la cohérence des choix et la cohésion des décisions.
Comme les autres nations historiquement dominantes, la France est prise dans le bouleversement de la redistribution de la puissance dans l’âge de l’information-communication. Il appartient aux citoyens de choisir des dirigeants à la hauteur des enjeux. C’est cela gouverner : maintenir le bon cap dans la tourmente pour atteindre les bons ports.